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Nous avons tous une vocation à suivre

La vie n'est pas toujours facile et on a parfois besoin d'un temps de répit. Mais même lorsque tout va bien, «L'atelier du futur», géré par les jésuites d'Innsbruck, en Autriche, offre un espace où l'on peut se ressourcer et se recentrer. Situé au milieu des montagnes tyroliennes, le Zukunftswerkstatt en allemand est un lieu où les jeunes adultes sont invités à prendre le temps de faire le point sur leur vie, de se poser des questions importantes pour leur avenir, lors de retraites et de temps de prière. Bien que «L'atelier du futur» soit une proposition d'une communauté religieuse catholique, ses programmes s'adressent à toutes les femmes et tous les hommes âgés de 18 à 30 ans, quelle que soit leur foi ou leur origine ethnique. En plus des jésuites, on y rencontre des jeunes gens venant d'Autriche, du Tyrol du Sud, d'Allemagne ou de Suisse qui remplissent de vie l'établissement.

«Tourne le monde à l'envers pour te chercher et te trouver!» Laura Meemann suit la devise «L'atelier du futur» depuis qu'elle y a résidé. Elle décrit ce qui cela a éveillé en elle.

Upside down

Un coucher de soleil au bord de la mer ressemble-t-il à un lever de soleil se reflétant sur une eau calme lorsque je fais le poirier? Peut-être. Alors ne devrais-je pas marcher plus souvent sur les mains? Oui, sans doute.
Quand je regarde le monde à l’envers, les montagnes s’étendent telle une guirlande dans le ciel où mes pieds flottent. Je fais le poirier, et hop, mon monde et ma vie basculent.
Parfois, je mets ma propre vie sens dessus dessous, et parfois la vie s’en charge malgré moi. Dans ces moments, c’est le monde à l'envers. Il y a tellement de questions qui me taraudent que je perds le sens. Où dois-je aller et quelle est ma place dans ce monde? Comment vivre une vie satisfaisante face aux crises et aux problèmes de notre époque? Lorsque chaque information sur le changement climatique et chaque nouvelle de l'état de la mer Méditerranée me dévaste et n’éveille en moi que consternation et impuissance? Comment trouver ma place dans un monde qui, malgré un individualisme assumé, semble exiger de moi de me conformer à un système? Et que se passe-t-il si j'essaye d'échapper à ce système? Il y a tant de questions.
Le soleil se lève-t-il ou se couche-t-il en ce moment? Dans quelle direction dois-je regarder? Après tout, il se couche à l’opposé de l'endroit où il se lève. On devrait peut-être essayer de tourner son regard de temps en temps à l'opposé des habitudes.
À la recherche d’un bas qui me serve de socle et d’un haut ouvert et libre, je suis arrivée pleine d’espoir à «L'atelier du futur» d’Innsbruck.

Se laisser surprendre

Ce que je recherche exactement? Je n'en sais rien. Est-ce que je le trouverai ici? Je crois que oui. Que cela sera-t-il?Aucune idée. Mais peu importe, j’ai confiance.
Il existe des endroits où toutes les questions peuvent être posées ou rester en suspens, où les réponses ne doivent pas toujours être adaptées aux attentes et où tous les sujets ont droit de cité. Il existe des lieux qui se situent à la frontière entre vie communautaire et recueillement, entre solidarité et solitude, entre agitation et calme. Il y a des endroits où j'ai le droit d'être, comme je suis. Sans prêter le flanc aux préjugés, au jugement et autres appréciations. Peu importe si mon bas est en haut, ou si mon haut est en bas. Peu importe si le soleil se lève ou se couche dans mon monde, et s'il change de sens dix fois par jour. On m’accueille telle que je suis, avec mes questionnements et mes doutes.
«L'atelier du futur» est un tel endroit. Routine commune. Réflexions sur les Écritures. Repas partagés. Prière. Revue quotidienne. Avec des espaces pour créer et pour être; des temps de vide aussi; des moments pour se questionner et d’autres pour répondre; des moments pour les problèmes et d’autres pour les solutions, des instants pour monter et d’autres pour descendre. Aux pieds de ces montagnes qui me font face parfois bien ancrées dans le sol et parfois, tête en bas, en guirlande dans le ciel, montagnes au-dessus desquelles s'étend un ciel sans limites dans lequel je peux perdre tour à tour ma tête, mes pieds ou mon cœur. Me perdre pour mieux me retrouver ensuite.

Partout et nulle part

Je suis dans ma chambre avec vue sur le jardin, dans un fauteuil à oreilles qui invite à réfléchir, lire, écrire, être. Ou dans la salle de médiation pour un moment en silence ou en musique, concentrée ou aux prises avec des pensées virevoltantes. Ou bien encore dans l'espace créatif parmi les couleurs vives qui tracent ce que je ne comprends pas encore moi-même. À moins que je ne sois dans la cuisine, en train de créer des liens, d'établir des relations, de vivre une convivialité familiale.
Je pourrais tout aussi bien être dehors, dans le jardin, ou sur la terrasse du toit. En ville. Tout dépend du cadre dont j'ai besoin à un moment précis.
Le silence. L'agitation. Les vastes panoramas ou les vues sur une chaîne de montagnes qui ressemble parfois à une guirlande, parfois des terres émergentes solidement ancrées dans le sol. Qui nous défient parfois ou nous plongent dans la nostalgie.
Me retrouver dans la présence des autres. Dans les conversations et les rencontres, dans la convivialité. Me trouver dans la présence de Dieu*. Encore et encore. Dans tous ces lieux, dans toutes ces interrogations. Qu’un esprit m'accompagne ou non. Que mon monde soit parfaitement axé ou sens dessus dessous. Que mon soleil se lève ou se couche. Que je perçoive davantage de solutions ou de problèmes. Que je me pose davantage de questions ou que je ne trouve de réponses. Ou les deux à la fois. Dieu* est là, dans l'entre-deux.
Il y a tant de choses à vivre dans l'entre-deux. Tant d'espaces vides à remplir. Tant de place pour se réaliser.
Tu peux venir ici avec tout ce que tu veux, comme avec rien du tout. Peu importe. Cela revient au même. L’essentiel est d’être. D’essayer de comprendre le mystère que tu es.
Le mystère que tu es dans ce monde.
Que tu es dans cette vie.
Que tu es, même quand tout est à l'envers.
Que tu es lorsque tu es.

Laura Meemann

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